La plupart des
personnes aux prises avec de la douleur chronique consomment des analgésiques
ou des médicaments de la famille des opioïdes qui ont été prescrits par leur
médecin dans le but d'atténuer la douleur. Il est alors normal d'observer, chez
certaines personnes, une légère crainte de développer une dépendance à ces
médicaments. De l'autre côté, il est aussi parfois difficile pour les médecins
de déterminer si la douleur déclarée par son patient est vraiment l'expression
de sa maladie ou si elle fait plutôt partie d'un problème de toxicomanie.
Cette crainte est
souvent disproportionnée par rapport au faible taux de pharmacodépendance
observé chez les personnes aux prises avec de la douleur chronique et qui n’ont
aucun antécédent de toxicomanie.
Une autre source
d’inquiétude est l’effet de l’usage à long terme des opiacés sur la sensibilité
à la douleur. En effet, la nécessité d'augmenter les doses de médicaments
opiacés peut être l’indice d’une plus grande tolérance aux effets analgésiques,
ce qui peut avoir des répercussions à long terme sur l’utilisation de ce type
de médicaments.
La demande d'une personne
à son médecin d’augmenter sa dose d’opiacés pourrait donc être un signe de
dépendance psychologique, lorsqu’il est évident que le patient ressent le
besoin de prendre ce médicament. Toutefois, ce genre de demande pourrait aussi
s’expliquer du fait que le patient recherche un meilleur soulagement de sa
douleur, suite à une dose prescrite insuffisante ou bien en raison d’une plus
grande sensibilité à la douleur causée par l’usage prolongé de médicaments
opiacés.
Heureusement, il
existe plusieurs outils à la disposition des équipes multidisciplinaires pour
évaluer les risques de dépendance d'une personne quant à une médication aux
opioïdes. L'un d'entre eux, fourni par la International Society of Addiction Medicine (ISAM), correspond à un
cadre d’évaluation des problèmes de douleur chronique, permettant d’analyser le
risque de dépendance des patients qui présentent une douleur et demandent des
opioïdes. Selon cet outil, il est généralement possible de classer les patients
en trois catégories :
Catégorie A : Le patient demande des opioïdes pour diminuer une
douleur perçue, mais l’évaluation montre qu’il faut avant tout diagnostiquer la
dépendance. La douleur, bien que chronique, sera gérable une fois la dépendance
traitée efficacement.
Catégorie B : Le patient qui veut des opioïdes présente une étiologie clairement
identifiable de la douleur et n’a aucun problème de dépendance présent ou
passé.
Catégorie C : Le patient présente non seulement une douleur
chronique nécessitant une thérapie continue aux opioïdes, mais aussi un
problème de dépendance. Il lui faut donc un suivi très attentif et d’une
structure stricte.
Une évaluation complète de la
problématique peut donc servir à classer les individus dans chacune de ces
catégories pour ensuite imposer le suivi le plus approprié.
La gestion de la douleur relève bien
entendu de la science, mais elle est aussi un art, demandant l'orchestration de
multiples formes d'intervention individualisées à chaque personne. Cela demande
une grande vigilance et une attention constante de la part du médecin traitant
et de son équipe, dans le but de fournir le traitement le plus approprié
possible, sans tomber dans les stéréotypes d'une potentielle dépendance ni dans
la peur de prescrire des opiacés et un traitement non efficace de la
problématique.
International Society of Addictive Medicine: www.isamweb.org
International Association for the Study of Pain (2008). Screening for potential opioid abuse. Pain, 16 (7), 1-4.
Mok, James. Douleur chronique et pharmacodépendance. Vie autonome Canada. Récupéré de: www.cnsaap.ca/Fra/ProfessionalToolkits/Treatment_Issues/Chronic_Pain_Management_and_Addiction_Medicine/Pages/default.aspx
Réseau Canadien des Professionnels en Toxicomanie et de Domaines Connexes (2011). Les principes de base du soulagement de la douleur chronique et de la médecine en toxicomanie. Récupéré de: www.cnsaap.ca/SiteCollectionDocuments/PT-Essentials_%20of_Chronic_Pain_Management_2011-06-fr.pdf
Pour en savoir plus
Réseau Canadien des Professionnels en Toxicomanie et de Domaines Connexes: www.cnsaap.ca
Centre Canadien de Lutte contre les Toxicomanies: www.ccsa.ca
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